Chapitre 121 : Contrôle

La bataille débuta. Selon Jack, il y avait trois favoris et un outsider. Les autres ne serviraient que de chair à canon.
Sheldon voulait survivre par tous les moyens afin de retourner auprès de sa nièce, dont les parents étaient décédés. Il utilisa son concept des jeux et envahit toute l'arène de cases grandeur nature d'un jeu de société. Les participants posant un pied sur une case marquée par un quelconque dessin devaient subir un gage mortel. En revanche, les cases départ, marquées par la lettre D, étaient des zones sans risque.
Yun, un humain, possédait une vitesse incroyable. Il élimina un concurrent sans que celui-ci ne comprenne ce qui lui était arrivé. Il prit Sheldon pour cible principale.
James, le tueur en série misogyne commença à s'attaquer à Juliette.
Oggy, qui n'avait aucune envie de se battre, pensa à sa famille. Il fut boosté et supprima un ennemi grâce à son concept du lit.
Score : un point pour les quatre combattants.

***


Alors que tout le monde est abasourdi par sa contre-attaque explosive, Oggy poursuit son assaut. Bien décidé à se salir les mains, il plonge dans la zone de sécurité d'un participant qui, jusque-là, n'avait pas bougé par prudence.

« On dirait que tu es vraiment pressé de mourir, avertit avec arrogance ce dernier, un grand barbu costaud aux courts cheveux noirs. Ne pense pas que je vais faire l'erreur de te sous-estimer. »

Le ventru ne daigne pas répondre. Son adversaire met ses menaces à exécution et brandit un énorme marteau. Oggy crée un coussin.

Les deux adversaires portent chacun un coup dans lequel ils mettent toutes leurs forces. La massue et l'oreiller s'entrechoquent, produisant un son si assourdissant qu'on croirait que le tonnerre gronde dans l'arène.

« Oh, quel échange insolite ! s'écrie Steve, captivé. Un coussin contre un marteau, qui aurait cru assister un jour à un tel contre ?! »

Emportés par la puissance du bras de fer, les deux ennemis sont propulsés dans des directions opposées. Oggy, à quelques millimètres de la sortie de leur case sécurisée, parvient à stabiliser son corps in extremis. Pareil pour son duelliste.

Les deux adversaires reprennent leur souffle. Tendus à l'extrême, ils se toisent afin de trouver une quelconque ouverture.

L'opposant du joufflu, lassé d'attendre, fonce.

Les coups de marteau sont extrêmement violents. Le visage d'Oggy est fouetté par le souffle des attaques, comme s'il était face à un buffle enragé. Un seul coup et son crâne sera complètement écrabouillé.

Alors qu'il recule progressivement, le ventru remarque soudain qu'il est dans une impasse. Un pas en arrière de plus et il tombera sur une case piégée. L'ennemi revient à la charge, plus agressif qu'un bélier déchaîné.

« Tu es fait comme un rat !! » hurle l'utilisateur de marteau, persuadé d'avoir gagné.

Le cœur d'Oggy bondit au point où ce dernier a l'impression qu'il va sortir de sa cage thoracique. La massue s'abat sur lui, impitoyable, broyant tout sur son passage.

Mais brusquement, le marteau stoppe sa descente. Son manieur se fait enrouler à l'intérieur d'une couette gigantesque.

« Quelle magnifique astuce ! s'extasie Steve. Au lieu de tenter de se protéger la tête comme tout le monde s'y attendait, Oggy a fait l'inverse !! Il a fait apparaitre une couverture sous les pieds de son adversaire pour le surprendre et l'engloutir ! Il est à sa merci, c'est le moment de l'achever !!! »

Le joufflu met à exécution la suggestion du commentateur. Son ennemi, qui se débat comme un insecte piégé dans une toile d'araignée, se fait totalement broyer par la pression du tissu se resserrant sur lui.

Oggy libère son duelliste. Celui-ci, les muscles, organes et os réduits en bouillie, s'écroule et se vide de son sang, telle une tomate écrasée.

« Quelle belle victoire !! Ça fait deux points pour Oggy ! Il est en tête !!! » annonce Steve, euphorique.

La foule s'emballe et acclame le combattant. Pourtant, le ventru est loin d'être heureux. Il renifle et retient ses larmes. Bien que ce soit sans doute le pire jour de sa vie, il ne se laisse pas parasiter par la mélancolie tentant de le consumer et poursuit son combat.

Pendant ce temps, Sheldon et Yun, en pleine guerre psychologique, n'apprécient pas les exploits d'Oggy. Tandis que le premier s'efforce de rester calme en analysant froidement la situation, Yun a le sang chaud. Il défie l'organisateur du jeu d'un regard perçant.

L'humain jette le cadavre qui était à ses pieds sur une case piégée. Il ne se passe rien.

« Je vois... ça ne fait aucun effet aux morts, constate l'ex tueur à gages. Alors, qu'est-ce qui se passe si je fais ça ? »

Yun plonge sur une case piégée, sous le regard stupéfait de tout le monde.

Cependant, il atterrit sur le dos du cadavre et ne subit aucun gage.

« J'en étais sûr ! jubile intérieurement le téméraire. Tant que mon corps, mes vêtements ou mes chaussures ne touchent pas directement le sol, je suis à l'abri. »

La seconde d'après, le guépard se jette sur les gibiers. En un battement de cils, deux concurrents se retrouvent la gorge ouverte, leurs os hyoïdes dans les mains sanguinolentes de Yun. Les deux victimes s'écroulent à l'unisson et le liquide écarlate inonde leur case de sécurité.

« In... Incroyable ! Qu'est-ce qui vient de se passer ?! Je n'ai rien compris !! ment Steve, ivre de joie. Décidément, la vitesse de Yun n'a pas d'égal ! Il passe en tête avec trois points !!! »

La foule, impressionnée, rugit.

L'humain saisit les cadavres et les balance sur les cases piégées afin de s'en servir prochainement comme tremplin.

Sheldon, décontenancé par ce retournement de situation, semble avoir baissé sa garde. Deux participants ayant eu la même idée se jettent sur lui. Le maître des jeux reprend vite ses esprits. Il crée deux yoyos géants qu'il étire dans la direction de ses nouveaux ennemis. Les ficelles du jouet s'enroulent autour des concurrents qui perdent l'équilibre.

L'un tombe sur une case marquée par un dessin de flèches multiples. Son corps est immédiatement perforé de toutes parts comme si des milliers d'armes tranchantes l'avaient déchiqueté. Il ne ressemble même plus à un humain.

Le deuxième chute sur un motif d'arme à feu. Aussitôt, un trou béant s'ouvre à l'arrière de son crâne et il meurt sur le coup.

« Cette arène est pire qu'un champ de mines !!! s'extasie Steve, en même temps que les spectateurs hurlent à en perdre la voix. Quelle technique sublime ! Trois points pour Sheldon également ! Il arrive à égalité avec Yun ! Difficile de prédire qui va l'emporter !! »

Yun profite du fait que Sheldon ait les deux mains occupées pour bondir sur lui. Néanmoins, ce dernier produit un ballon de football, qu'il propulse sur lui d'un coup de pied magistral.

L'humain croise ses bras afin de se protéger de l'attaque. Il est toutefois propulsé et manque de dégringoler sur une case piégée. Heureusement pour lui, il atterrit sur le ventre d'un cadavre qu'il avait placé.

« Ne pense même pas une seconde pouvoir me surprendre, affirme le maître du jeu, stoïque. N'oublie pas que c'est moi qui contrôle ce combat. »

Yun se relève, furibond. Cette provocation est inacceptable.

Vif comme l'éclair, il égorge une nouvelle brebis qui n'a rien vu venir avec ses doigts plus tranchants que des tronçonneuses. Après avoir récolté son quatrième point, il lance le sacrifice sur une case piégée...

Tout à coup, l'humain donne un coup de pied fulgurant dans le cadavre, modifiant sa trajectoire. Le corps dénué de vie entre brutalement en collision avec Sheldon. Celui-ci, ébahi, est projeté en arrière.

« Oh quelle ruse ! s'exclame Steve, passionné. Yun nous a tellement habitué à lancer ses victimes sur les cases piégées que Sheldon a manqué de vigilance et n'a pas imaginé qu'il balancerait un cadavre directement sur lui !! »

Le maître des jeux glisse sur plusieurs centimètres et retrouve son équilibre, manquant de justesse de tomber sur une case mortelle. Il grimace et ignore tant bien que mal la douleur rongeant son flanc.

Toutefois, le mal est déjà fait.

Yun plonge dans sa zone de sécurité et allonge ses doigts afin de les planter dans son cou. Les deux rivaux sont face à face, à moins d'un mètre l'un de l'autre. Pour une fois, la panique se lit sur son visage.

Avant que son ennemi ne le touche avec sa technique d'assassinat, le maître des jeux s'enferme dans un dé géant. Le rythme cardiaque de ce dernier s'accélère comme la course d'un étalon, bien qu'il soit temporairement à l'abri.

« Réfléchis, réfléchis, réfléchis... ! » se dit Sheldon.

Il applique sa méthode pour se calmer lorsqu'il est soumis à un stress intense. Il se remémore des souvenirs qui l'apaisent en toutes circonstances.

Pendant ce temps, une pluie de poupées à l'image d'Oggy envahit l'arène, mais personne n'y prête attention.

La protection de Sheldon cède rapidement aux doigts destructeurs de Yun. Le dé s'effondre, telle une maison en démolition. Néanmoins, le maître des jeux a retrouvé son sang-froid légendaire.

Alors que l'humain s'apprête à attaquer de nouveau, une musique funk retentit dans l'arène.

De minuscules carrés azur et rouges apparaissent sur le sol, près des deux combattants. Inutile d'expliquer les règles. Yun comprend instinctivement que s'il ne pose pas rapidement ses pieds sur toutes les cases écarlates - étant plus proches de lui - avant qu'il ne soit trop tard, il subira un gage. Celles en bleu correspondent à Sheldon.

Les deux adversaires mettent leur duel en suspens et placent leurs jambes sur tous les rectangles qui apparaissent et disparaissent à une vitesse hallucinante.

Les spectateurs et les autres combattants sont médusés qu'ils puissent tenir ce rythme infernal. Personne n'ose s'approcher d'eux, de peur de finir en victime collatérale.

« Toi, contrôler le combat ? Ne me fais pas rire, gausse Yun. Tu es complètement cerné. Même si ton pouvoir est dangereux, tu es obligé de suivre les règles avec nous. Autrement dit, si tu commets une erreur, c'est fini pour toi ! »

Ce dernier arrive à s'habituer au jeu et parvient à attaquer tout en plaçant ses pieds au bon endroit. Les yeux rivés sur le sol, il repère le maître des jeux en suivant les mouvements de ses jambes. Les doigts véloces de Yun ne cessent de frôler la gorge de Sheldon, en proie à une pression étouffante.

« Pourquoi ?! Je suis beaucoup plus rapide que lui, mais... ?! »

L'humain, de plus en plus agacé, redouble de vitesse. Il lacère la peau du maitre des jeux, sans pour autant toucher ce qu'il cherche. Sheldon, malgré ses multiples blessures et la douleur grandissante, garde son calme.

« J'ai saisi ! s'emballe Steve, passionné par leur échange. Sheldon a mis en place ce jeu de danse pour obliger Yun à placer ses jambes à des endroits précis. En d'autres termes, ça lui permet de savoir exactement d'où il va attaquer, et ainsi esquiver, avant même que le coup ne soit porté ! Que c'est bien joué !! »

Tout à coup, la musique s'arrête. Les rectangles colorés disparaissent. Sheldon halète, l'air harassé. Sûr qu'il a remporté la victoire, Yun affiche un large sourire et s'apprête à donner le coup de grâce.

Mais brusquement, les pieds de ce dernier s'arrachent, comme s'ils avaient été tranchés par une scie invisible. L'humain s'étale de tout son long, d'abord estomaqué, puis se tord de douleur. Son sang arrose la zone de sécurité, dans laquelle poussent les fruits de l'ingéniosité de Sheldon.

« Quelle stratégie INCROYABLE !!! s'époumone Steve. Quelle fourberie effroyable !Yun associait inconsciemment la musique au jeu. En faisant disparaitre momentanément les rectangles colorés, Sheldon lui a fait croire que la partie était terminée. Et il les a fait réapparaitre, sans reprendre le son. Yun ne s'est donc pas aperçu que le jeu continuait, et a subi le gage pour ne pas avoir placé son pied au bon endroit à temps !!

- Je te l'ai déjà dit, déclare calmement Sheldon. C'est moi qui contrôle ce combat. Et personne, surtout pas toi, ne m'empêchera de retourner auprès de ma nièce. »

Yun pris de court et soumis à une souffrance insupportable, n'arrive à rien répliquer. Le maître des jeux crée une bille entre ses doigts. Sans hésiter, il la propulse sur son ennemi. Le minuscule objet traverse le front de sa cible, pourfend son cerveau et ressort par le crâne.

L'humain, inerte, s'effondre et rend son dernier souffle.

C'est le silence complet dans la salle. Spectateurs comme combattants sont éberlués par la tournure des évènements.

« Y... Yun n'est plus !!!! s'égosille Steve, la voix tremblante de passion. Notre organisateur de jeux préféré égalise avec quatre points ! Quel combattant extraordinaire ! Je t'aime Sheldon !! »

Des exclamations assourdissantes résonnent. La foule est en délire.

Jack, n'ayant raté aucune miette, a des frissons de plaisir

« Comme je m'en doutais... Sheldon fait des ravages. Qui parviendra à l'arrêter ? » murmure le chef de l'organisation.

Oggy, consterné, observe l'immense obstacle qui se dresse devant lui.

« C'est qui, ce type... ? D'où il sort cette détermination de malade... ? » s'inquiète le ventru.

Sheldon tire sa volonté des souvenirs qui lui ont permis de garder son sang-froid, alors qu'il était en situation de crise. Souvenirs qui resteront gravés en lui à tout jamais.

***


Sa nièce, Agnès avait quatre mois. Un soir, sa sœur et son beau-frère se présentèrent chez lui avec le nourrisson.

« Merci d'avoir accepté de t'occuper d'elle, Sheldon, dit chaleureusement la mère.

- Hmph, c'est pas comme si j'avais le choix ! maugréa ce dernier en récupérant le bébé. Je déteste les gosses, mais c'est le genre de services qu'on ne peut pas refuser ! »

Amusés, les parents le saluèrent, avant de s'en aller.

Désormais face à face avec « le sac de bave », comme il aime l'appeler, Sheldon cessa de jouer la comédie. Son regard mauvais se transforma en une grimace qui fit rire Agnès.

Les fossettes sur ses joues rondes et sa voix si mignonne firent fondre son oncle. Il ne mentait pas. Il détestait vraiment tous les bébés... excepté elle. Et ce qu'il aimait par-dessus tout était son rire.

Il s'amusa avec elle jusqu'au retour des parents.

Les années passèrent et il s'occupait régulièrement d'Agnès quand ses géniteurs étaient absents. Il la vit grandir, commencer à marcher, dire ses premiers mots.

Quand elle avait neuf ans, ils eurent une petite conversation, pendant qu'ils jouaient aux cartes chez lui.

« Tu sais... commença-t-il affectueusement. Le dimanche est mon jour préféré de la semaine.

- Parce que tu dois me garder quand papa et maman sortent entre amoureux ? devina innocemment la petite fille.

- Exact ! confirma jovialement Sheldon.

- Moi aussi, c'est mon jour préféré ! » avoua la fillette.

Alors que son oncle était aux anges suite à cette déclaration, elle compléta :

« Parce que y a pas école ! »

Le visage de Sheldon se décomposa de dépit. Agnès éclata aussitôt de rire. L'oncle comprit qu'elle plaisantait, avant de s'esclaffer à son tour.

Le sourire de la petite fille était toujours aussi éblouissant.

Toutefois, après le décès de ses parents, elle perdit cette expression que Sheldon appréciait tant.

Il fera tout ce qui est en son pouvoir pour retrouver Agnès et l'aider à surmonter cette épreuve. Quel qu'en soit le prix.

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