Chapitre 86 : Une famille

Malgré le fait qu'elle vivait dans une famille très aisée, Sonya souffrait de la solitude qu'engendrait l'absence de ses parents. Après la trahison de sa seule amie, Lily, elle refusa de retourner au lycée et décida de fuguer.

***


Le même soir, elle s'échappa discrètement de la maison avec un peu d'argent. Malgré le léger froid et l'ambiance hostile, elle se sentait bien mieux qu'à l'intérieur de son domicile luxueux.

Toutefois, son sentiment de liberté ne dura pas longtemps. À peine s'était-elle éloignée de son foyer, qu'un individu s'attaqua à elle. Son agresseur était un criminel réputé, qui la ciblait depuis longtemps. Étant donné qu'elle ne sortait jamais sans garde du corps, il n'avait jamais eu l'occasion de la capturer.

Il la saisit impitoyablement par la gorge et avoua qu'il avait l'intention de contacter son père pour lui exiger une rançon. Elle avança que l'homme d'affaires n'en avait rien à faire d'elle. Le criminel, agacé, resserra son étreinte, au point où elle n'arrivait plus à respirer. Les yeux rouges, elle était au bord des larmes.

Cependant, ça se passa en un instant. Un coup discret, violent et précis. L'adulte se fit broyer le crâne. Il s'écroula et mourut sur-le-champ. Sonya n'avait aucune compassion pour son agresseur. Il avait tenté de lui faire du mal, tout comme ses nombreuses victimes, alors, il n'avait eu que ce qu'il méritait.

Elle tomba lourdement sur ses fesses et ferma les yeux, tant son bassin était endolori. Mais également soulagée, elle respira à grandes goulées. Lorsqu'elle rouvrit ses paupières, elle vit un garçon et une fille. C'étaient, eux aussi, des adolescents, mais ils paraissaient plus jeunes. Un nigh et une humaine. Ils devaient avoir entre treize et quatorze ans.

Les sauveurs avaient un regard froid. Ils n'accordèrent pas plus d'attention à Sonya et s'apprêtèrent à s'en aller.

Elle les interpella et montra sa gratitude en faisant sortir une petite somme de son sac à main :

« Sans vous, je ne sais pas ce que je serais devenue. C'est pour vous remercier ! »

Le garçon et la fille regardèrent l'argent, totalement indifférents. La sauveuse secoua simplement sa tête, et l'adolescent ajouta :

« Non, merci. Qu'est-ce que tu veux qu'on fasse de ça ? »

Sonya écarta ses lèvres, tant elle était éberluée. C'était la première fois que quelqu'un agissait de manière totalement désintéressée à son égard. Le garçon continua :

« Et puis, c'est pas spécialement toi qu'on voulait sauver. On cherchait à éliminer ce type depuis un moment, qu'est-ce que tu as cru ? »

L'humaine hocha la tête, avant qu'ils ne disparaissent aussi vite qu'ils étaient apparus.

Sonya ne se sentait pas en sécurité après ce qui venait de se passer. Néanmoins, elle n'avait pas peur de mourir. Une seule chose lui importait : retrouver ces deux adolescents.

Étrangement, elle ne croisa aucun individu mal intentionné sur son chemin. En réalité, ce n'était pas de la chance. Les deux adolescents la suivaient en cachette et se servaient d'elle comme appât pour attirer les hors-la-loi. Ils les supprimaient dans la plus grande des discrétions.

Néanmoins, ils finirent par tomber sur un adversaire plus coriace.

Après huit jours d'inlassables recherches, Sonya entendit un son strident tout près d'elle. Elle fonça sur les lieux sans réfléchir.

Elle ne fut pas déçue lorsqu'elle trouva l'origine du bruit. Les personnes qu'elle cherchait étaient en plein combat. Leur ennemi avait le pouvoir de créer des explosions. Malgré le chaos, Sonya sourit de toutes ses dents et se rapprocha discrètement de la fille.

Lorsqu'ils l'aperçurent, les deux adolescents lui lancèrent un regard glacial.

« Casse-toi de là ! Qu'est-ce que tu fous ici ?! hurla l'adolescent en esquivant les attaques de son adversaire.

- Je... je vous cherchais depuis longtemps... ! tenta Sonya.

- T'es débile... ? Parce qu'on t'a sauvée une fois, t'as pensé qu'on pouvait devenir potes ? J'avais même oublié ton existence, t'es rien pour moi ! On n'a pas besoin d'amis, c'est clai... ? »

Distrait, le garçon se prit une déflagration de plein fouet dans l'abdomen et il se fit propulser. Grâce à son Drive, il parvint à résister au choc et la blessure n'était pas très profonde. Toutefois, l'adulte fonça sur l'humaine afin de le déstabiliser.

« Si je prends cette foutue gamine en otage, la partie est terminée ! » pensa le criminel.

Prise au dépourvu, la cible ne réagit pas à temps. Néanmoins, Sonya s'interposa. L'adulte balaya la nigh d'une explosion qui lui ouvrit le ventre. Le garçon profita de cette petite seconde pour intervenir à son tour et assener un puissant coup de poing au criminel. Ce dernier, étourdi, resta à terre un moment.

Sonya gisait au sol et se vidait de son sang. Les adolescents ignoraient si elle avait des pouvoirs. Sa blessure était potentiellement mortelle. Eux, qui ne voulaient s'attacher à personne, se surprirent à s'inquiéter pour elle.

« Pourquoi... ? murmura l'adolescent...

- La vraie amitié... ne s'achète pas. C'est inconditionnel... alors... je n'ai pas besoin de raison... pour vous venir... en aide...

- Amitié... ? » répéta-t-il, incrédule.

Les adolescents restèrent muets, abasourdis. Ils ne la connaissaient même pas. Pourtant, elle n'avait pas hésité à se sacrifier pour eux ?

Le garçon grinça des dents. Il hurla de rage, avant de se jeter sur le criminel. Fermement décidés à venger l'inconnue, le nigh et l'humaine reprirent la bataille. Ils ne tardèrent pas à pourfendre le cœur du malfrat grâce à la manche du pull de l'adolescent.

Pensant que l'affrontement était terminé, il tourna le dos à son adversaire. Pourtant, l'adulte n'avait pas dit son dernier mot. Il concentra toute son énergie pour créer une ultime explosion. Le garçon se retourna, mais il n'était pas assez rapide pour esquiver.

Soudain, le criminel encaissa un coup de pied véloce dans le menton qui le propulsa dans les airs. Une détonation aveuglante et assourdissante se produisit dans le ciel. S'il avait été touché, l'adolescent se serait fait carboniser.

Le garçon faisait face à un blond aux yeux fermés.

« Qui... es-tu ? prononça-t-il, totalement déboussolé.

- Appelle-moi Skill. »

Les adolescents lancèrent un regard triste en direction de Sonya. Skill posa sa main sur l'abdomen de la blessée, avant de les rassurer :

« Elle a des pouvoirs. Sa plaie a commencé à se refermer. »

Le garçon et la fille ne purent s'empêcher de sourire, avant de souffler de soulagement.

Après avoir discuté, les adolescents comprirent qu'ils avaient exactement le même objectif que le blond. Ce dernier, reconnaissant leur talent pour avoir vaincu un adversaire aussi dangereux, leur proposa de travailler pour lui.

Skill était puissant et dégageait une aura rassurante. Les adolescents, après mûre réflexion, en déduisirent qu'ils seraient plus en sécurité avec lui. Ils acceptèrent de le rejoindre, du moins pour une période d'essai.

Sonya reprit connaissance, complètement guérie sur l'un des canapés du salon de Skill. D'abord déconcertée par le décor, elle fut ravie de voir que les deux adolescents s'en étaient sortis, et le sentiment était réciproque.

L'humaine tendit sa main et lui sourit. Sonya la prit tendrement, avant d'enchaîner :

« Je m'appelle Sonya, et vous ?

- Berthold, et elle, c'est Annie. »

Sonya était heureuse. Heureuse d'être enfin acceptée telle qu'elle était.

Lorsque la nigh apprit à quel point Skill était fort, elle lui demanda de lui apprendre à se battre. Sa mère représentait tout pour elle, et elle avait été assassinée par un criminel sans scrupules. Alors, elle non plus, n'hésiterait pas à supprimer ces individus dénués de morale.

Le blond accepta dans le but de l'enrôler plus tard. Ils commencèrent l'entraînement et il l'hébergea pendant quelques semaines.

***


Sonya décida de retourner voir son père. Lui qui passait d'habitude toutes ses journées au travail, était dans sa demeure en pleine journée, mort d'inquiétude. Lorsqu'il aperçut sa fille, il la prit dans ses bras, ne cachant pas son immense joie.

« Sonya... ça fait plus d'un mois. Plus d'un mois que tu as disparu sans donner de nouvelles. J'ai ouvert une enquête pour te retrouver. Où étais-tu ?

- C'est maintenant que tu te rends compte de mon existence ? » rétorqua-t-elle avec froideur.

L'homme d'affaires la fixa d'un air troublé. La jeune fille continua :

« Depuis que je suis toute petite, tu n'as jamais montré le moindre intérêt pour moi ! Et maintenant, tu joues au bon papa ?!

- Sonya ! s'exclama son père, indigné. Tu sais bien que je n'avais pas le temps ! Mais là, c'est différent ! Je ne pouvais pas rester indifférent, alors que tu étais peut-être en danger ! Tu es ma fille et je t'aime !

- Franchement, ça ne se voyait pas ! rouspéta-t-elle. Je suis revenue seulement pour prendre mes affaires. Et aussi, pour te dire que je n'en veux pas de ton héritage ! Désormais, je vais me débrouiller avec mes propres moyens ! »

Le géniteur avait les yeux exorbités, tant il avait du mal à croire ce qu'il entendait.

« Arrête de dire des bêtises ! Que tu le veuilles ou non, mon sang coule dans tes veines ! Cette maison, mon entreprise, absolument tout ça t'appartient ! À ton avis, pour qui ai-je travaillé toute ma vie ? Pour qui ai-je bâti tout ça ?!

- Tu peux toujours faire des dons. Si tu savais le nombre de personnes sans toit que j'ai rencontrées... »

Le père de Sonya était rouge de colère. Malgré tout, elle restait inflexible.

« Papa, conclut-elle le plus calmement possible, si tu m'aimes vraiment, respecte ma décision. Je n'en veux pas de ton argent. Je vais chez un ami avec qui je serai en sécurité. »

Aussitôt sa phrase terminée, elle se dirigea vers sa chambre.

« Sonya ! Je suis ton père ! Écoute-moi quand je te parle !!! » fulmina-t-il.

Il la supplia encore et encore, mais rien ne la fit changer d'avis. Totalement impuissant, le cœur serré, il regarda sa fille quitter son foyer avec toute la rancœur qu'elle avait accumulée durant ces nombreuses années.

Elle retourna chez Skill afin de poursuivre son entrainement. Malgré tout, elle revenait parfois chez son père pour lui donner de ses nouvelles. Cependant, leur relation restait terne. Ils se voyaient dans une ambiance tendue et ça ressemblait plus à un compte rendu qu'autre chose.

Elle passait ses journées avec le blond, Berthold et Annie. Les trois adolescents progressaient ensemble, riaient, mangeaient à la même table.

L'entraînement était dur. Bien que sévère, Skill restait bienveillant. Quand elle faisait des erreurs, il se montrait toujours patient. Il était une véritable source de motivation pour elle et la poussait à donner le meilleur d'elle-même.

Grâce à lui, Sonya se révéla être un génie du combat. Quand elle se concentrait, elle était d'une précision et d'un talent monstrueux.

À dix-sept ans, lorsqu'elle intégra l'équipe de Skill, elle était heureuse de travailler pour lui. Chaque fois qu'elle rentrait de mission, il la félicitait et montrait qu'elle avait de la valeur à ses yeux.

Sonya avait trouvé ce qu'elle cherchait depuis longtemps... Une famille.

***


Qu'en est-il de cette famille, maintenant ?

Berthold et Annie, en qui elle a placé toute sa confiance, l'ont trahie. À chaque fois qu'elle s'attache à quelqu'un, il la poignarde dans le dos.

En repensant à ces souvenirs, Sonya serre ses poings. Un mélange de colère et d'affliction tourbillonne en elle. Elle se fait déchiqueter au niveau de l'abdomen, mais cette douleur physique n'est rien comparée aux sentiments qu'elle éprouve.

Elle fixe intensément son chef.

« Si tu es un bon leader... ? répète-t-elle. Skill, tes crises de dépression au mauvais moment sont un réel problème... »

Elle pose sa main sur sa poitrine pour symboliser l'affection et le profond respect qu'elle éprouve envers lui, avant de s'exclamer :

« Mais en dehors de ça... je n'ai rien à te reprocher ! Skill, tu es et tu seras toujours un modèle pour moi. Je n'ai jamais remis en cause tes décisions, parce qu'elles sont les bonnes ! Je te jure que quoi qu'il arrive, je resterai de ton côté. Ces traitres sont complètement à côté de la plaque ! On va les retrouver et les détruire ! »

Le blond hausse ses sourcils. Il ne s'attendait pas à une telle réponse. Néanmoins, tout dans la voix de Sonya indique que ses paroles sont sincères.

Alex rehausse ses lunettes de soleil et fronce les sourcils. Il répète le même geste que sa collègue et ajoute, plus déterminé que jamais :

« Je ne connais personne de plus badass que toi. Elle a tout dit. T'es le meilleur ! »

Cody garde les bras croisés. Toutefois, lui non plus ne manque pas de volonté. Pour une fois, il exprime ses réels sentiments :

« C'était pas dans mes projets de bosser pour quelqu'un d'autre. Tu es la seule personne pour qui j'ai envie de taffer et j'en suis satisfait. Arrête de pleurnicher tout le temps et tu seras parfait. »

Skill est interloqué par les retours de ses subordonnés. Leurs propos a pour effet de le revigorer. Il élimine toute trace de dépression en lui. De nouveau empli de détermination, il inspire et expire profondément, avant de déclarer :

« Merci à tous d'avoir exprimé le fond de votre pensée. Je vous promets que je ne vous décevrai pas. Trouvons une bonne stratégie et allons les exterminer. »

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